catherine.taurand | Blog Avocats

Un arrêt récent de la cour administrative d’appel de Paris (CAA de PARIS 21 février 2018, n° 16PA03007, Ministre de l’Intérieur) apporte des précisions intéressantes sur le lien existant entre la protection fonctionnelle et le harcèlement moral dans la fonction publique.

Dans cette affaire, l’agent public avait sollicité le bénéfice de la protection fonctionnelle à deux titres :

D’abord, à raison de l’instance judiciaire dans le cadre de laquelle il avait été cité à comparaître devant le Tribunal correctionnel de Paris pour faits d’outrages, rébellion et violences volontaires à l’encontre de personnes chargées d’une mission de service public.

Dans ce cadre il était donc la personne accusée.

Il ne contestait pas les faits, qui s’étaient produits alors qu’il était en état d’ébriété à l’issue d’un pot de départ d’une collègue, dans les locaux du ministère de l’intérieur, pendant les heures de service, et à laquelle assistaient ses supérieurs hiérarchiques.

La Cour considère que  ces faits étaient constitutifs d’une faute personnelle commise alors que l’agent était responsable de ses actes.

Elle en conclut que  la faute personnelle ainsi commise justifiait que la protection fonctionnelle lui soit refusée.

En résumé, la Cour considère que la faute personnelle commise par l’agent public justifie que lui soit refusée la protection fonctionnelle dans le cadre de l’instance pénale menée contre lui à raison de ces faits, même si ceux-ci ont été commis pendant les heures de service sur son lieu de travail.

D’autre part, à raison des faits de harcèlement moral dont il s’estimait lui-même victime.

A cet égard, la Cour a examiné les faits de l’espèce et les témoignages versés au dossier.

Elle a constaté qu’il ressortait du dossier, notamment d’un témoignage d’un commandant de police, supérieur direct de l’agent public était bien l’objet d’une violente attaque des personnels policiers du service  qui lui déniaient la possibilité de relire certaines enquêtes, que l’agent public n’avait plus de réelle activité et passait ses journées à fumer et à lire la presse, qu’il avait informé sa hiérarchie de ce qu’il suivait un traitement médical lié à son état dépressif, qu’il avait été l’objet de propos et de comportements qui confinent au harcèlement et parfois à la discrimination.

Elle a également constaté que la collègue qui organisait son port de départ attestait elle-même que  le nouveau responsable de la cellule CNIL, transmettait les dossiers directement aux collaborateurs de cet agent public sans les évoquer au préalable avec lui, ne l’impliquait que très ponctuellement dans l’activité de la cellule  et que très rapidement, ce responsable n’a pratiquement plus confié de dossiers à cet agent.

La Cour relève également que les pièces du dossier démontraient que l’agent public vivait très mal cette mise à l’écart, qu’il était très abattu, que son mal être était palpable et que les relations avec son responsable se sont alors détériorées et que l’agent faisait l’objet d’un  dénigrement systématique.

La Cour a donc conclu (dans le sens inverse du tribunal administratif de Paris) que  ces éléments étaient de nature à faire présumer l’existence d’un harcèlement moral de la part de sa hiérarchie et que, dans ces conditions, la protection fonctionnelle pour ces faits de harcèlement moral ne pouvait lui être refusée.

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