Un récent arrêt du Conseil d’Etat précise deux points importants en matière de rupture conventionnelle dans un contexte de harcèlement moral (CE 16 mai 2025, n°493143 aux Tables)

Dans cette affaire, une salariée protégée et son employeur avaient conclu une convention par laquelle ils avaient décidé de mettre fin d’un commun accord au contrat de travail de l’intéressée.
Cette rupture conventionnelle avait été autorisée par l’inspectrice du travail mais le tribunal administratif de Strasbourg avait déclaré que cette décision d’autorisation était entachée d’illégalité en tant qu’elle retenait l’absence de vice de consentement de la salariée à la rupture conventionnelle. Sur ce point, le tribunal avait relevé que la salariée avait fait l’objet de faits de harcèlement moral de la part de son employeur et que, « consécutivement, la violence morale exercée par son employeur a été de nature à vicier son consentement à la rupture conventionnelle ».a pièce maîtresse dans le raisonnement du tribunal était le courriel dans lequel la salariée évoquait son intention de solliciter une rupture conventionnelle faute d’avoir été déclarée inapte par le médecin du travail.

Le Conseil d’Etat a d’abord rappelé le principe selon lequel l’inspecteur du travail, saisi d’une demande d’autorisation d’une rupture conventionnelle, doit s’assurer notamment, au vu de l’ensemble des pièces du dossier, que la rupture n’a été imposée à aucune des parties et qu’aucune circonstance, en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées par le salarié ou avec son appartenance syndicale, n’a été de nature à vicier son consentement.

Surtout, après ce rappel, il souligne expressément que « l’existence de faits de harcèlement moral ou de discrimination syndicale, commis par l’employeur au préjudice du salarié protégé, n’est, par elle-même, pas de nature à faire obstacle à ce que l’inspection du travail autorise une rupture conventionnelle, sauf à ce que ces faits aient, en l’espèce, vicié le consentement du salarié ».

En d’autres termes, pour le Conseil d’Etat, le simple fait de prouver le harcèlement moral ne suffit à démontrer que le consentement du salarié victime de harcèlement a été vicié. Il faut encore prouver de quelle manière et si réellement ce harcèlement a pu le vicier.
Au cas d’espèce, le Conseil d’Etat a considéré que la salariée était assistée d’un avocat et surtout, que c’était elle qui avait sollicité la rupture conventionnelle.

Ce faisant, le Conseil d’Etat a censuré le jugement du tribunal et a considéré que, malgré le contexte de harcèlement moral, le consentement de la salariée n’avait pas été vicié.

Il ajoute une seconde précision intéressante en rappelant d’abord que, lors des entretiens préalables organisés pour convenir du principe d’une rupture conventionnelle, l’employeur peut se faire assister quand le salarié lui-même se fait assister mais en ajoutant que « l’assistance de l’employeur lors de l’entretien préalable à la signature de la convention de rupture alors que le salarié se présente seul à l’entretien n’entache d’illégalité la décision de l’inspection du travail autorisant la rupture conventionnelle que si cette assistance a, dans les circonstances de l’espèce, eu pour effet d’exercer une contrainte ou une pression pour le salarié, de nature à vicier son consentement » , ce qu’il ne retient pas en l’espèce.

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