Cet été, la cour administrative d’appel de Versailles a rendu un arrêt courageux participant à la protection des cigognes noires, espèce protégée classée en danger d’extinction (CAA Versailles 12 juillet 2024, n°22VE02792).
Dans cette affaire, une société d’exploitation éolienne demandait l’annulation de l’arrêté par lequel la préfète d’Indre-et-Loire avait refusé de lui accorder une autorisation environnementale pour la construction d’un parc éolien composé de 7 aérogénérateurs sur deux communes.
La Cour a rejeté la requête et confirmé la légalité de l’arrêté de rejet.
Elle a d’abord relevé que le site d’implantation du projet était localisé entre deux secteurs d’étangs et entre deux forêts, près de zones naturelles d’intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF) et de zones Natura 2000 avec la présence de cours d’eau et de zones humides qui sont des secteurs favorables pour l’alimentation, la nidification et la reproduction des oiseaux.
Elle a ainsi établi que le site présentait une sensibilité particulière au plan écologique et ornithologique et relevé, en particulier, la présence du nid d’un couple de cigognes noires à proximité du site, cette espèce ayant, par ailleurs, la capacité de rejoindre des zones de gagnages sur un rayon de 20 kilomètres autour de son nid., de sorte que des survols vers le site d’implantation des éoliennes envisagées n’étaient pas exclus. L’affirmation du pétitionnaire selon laquelle les cigognes noires se déplaceraient dans la direction opposée au projet, n’a donc pas été retenu de même, par conséquent que l’argument selon lequel le projet contesté n’induirait potentiellement aucune perturbation ni risque de collision pour la cigogne noire.
Au-delà, la Cour a relevé que la phase de travaux génèrerait un risque de dérangement ou de destruction modéré à fort pour six espèces , en période d’exploitation, des risques de collision, de dérangement, de perte d’habitat et d’effet barrière qualifiées de négligeables à faibles pour l’ensemble
Elle a également conclu que « si le pétitionnaire affirme, d’ailleurs sans le démontrer, qu’après application des mesures ERC possibles, les impacts résiduels du projet sur l’avifaune peuvent être considérés comme non significatifs, que ce soit en phase de travaux ou en phase d’exploitation, il reconnait ainsi que ce risque n’est pas nul. Il n’est donc pas établi que la mise en œuvre de ces mesures ERC ferait totalement disparaitre les risques à l’égard des cigognes noires ».
Rappelant enfin qu’une autorisation d’exploiter ne peut être refusée dans ces circonstances que si les intérêts mentionnés au code de l’environnement, et notamment la protection de la nature et de l’environnement, ne peuvent être préservés par des prescriptions particulières, des mesures d’évitement et de réduction, qu’il appartient au préfet d’édicter, elle a décidé que, « en l’espèce, la simple énumération par le pétitionnaire d’une longue liste de mesures complémentaires qui pourraient être mises en œuvre, à son initiative ou sur prescription du préfet, ne suffit pas à faire disparaitre l’existence du risque induit par le projet pour les cigognes noires
C’est pour cette raison qu’il a également rejeté la possibilité laissée au juge administratif d’autoriser une telle installation en l’assortissant des conditions qu’il juge indispensables à la protection des intérêts sus-visés.
Enfin et à raison, la Cour n’a pas écarté le fait que la Préfète ait pu commettre des erreurs dans l’appréciation des autres atteintes aux intérêts protégés mais a parfaitement relevé que cela n’avait aucune influence sur la légalité de son refus, dans la mesure où elle aurait pris la même décision en se fondant uniquement sur les atteintes existantes à l’égard des cigognes noires.
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