Il est rare que la jurisprudence reconnaisse la pression qu’un vérificateur peut imposer à un contribuable au cours d’un contrôle fiscal et en tire les conséquences qui en découlent. C’est pourtant ce que vent de faire la cour administrative d’appel de Paris (CAA Paris 10 avril 2020, n° 18PA02719).

Dans cette affaire, une SARL avait fait l’objet d’une vérification de comptabilité.

Au terme de cette vérification, l’administration fiscale avait considéré  que les recettes non déclarées par cette société avaient été mises à la disposition de son associé gérant désigné comme bénéficiaire des distributions à hauteur de 50%.

Elle a ainsi imposé ces sommes entre les mains du gérant associé dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.

Le gérant n’a pas obtenu gain de cause en première instance mais la Cour l’a déchargé des sommes réclamées en suivant le raisonnement suivant.

Certes, par lettre signée par l’avocat qui la représentait, la SARL avait bien désigné son gérant comme bénéficiaire des revenus réputés distribués par suite des rehaussements de ses recettes.

Cependant, la Cour a relevé que par un courrier, l’administration fiscale avait fait savoir à la SARL que, faute pour elle de faire contresigner son courrier de désignation des bénéficiaires de ses revenus distribués par ces bénéficiaires eux-mêmes, elle encourait toujours l’application de l’amende prévue par l’article 1759 du code général des impôts.

Elle a alors considéré que ce courrier constituait une pression exercée par le vérificateur qui avait directement conduit à la signature du gérant sur le courrier le désignant comme bénéficiaire.

La Cour a donc conclu qu’ « eu égard aux pressions ainsi exercées par le vérificateur dans des conditions contraires aux règles de la procédure d’imposition qu’il était tenu de respecter, les requérants sont fondés à soutenir que la signature que M. D… a cru devoir apposer (…) sur le courrier le désignant comme bénéficiaire des revenus distribués ne lui est pas valablement opposable et demeure sans incidence sur la charge de la preuve de son appréhension de ces revenus distribués, qui pèse sur l’administration ».

Or, s’agissant de la preuve de l’appréhension des sommes qui pesait donc sur l’administration, la Cour relève que l’administration fiscale s’était précisément bornée à invoquer la signature par le gérant du courrier le désignant comme bénéficiaire.

Elle en déduit que l’administration ne rapporte pas la preuve de l’appréhension par le gérant de ces revenus et le décharge ainsi de l’ensemble des impositions et pénalités laissés à sa charge à ce titre.

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