Dans une décision novatrice du 3 juin 2022, le Conseil d’État a redessiné les contours des règles en matière de communication de correspondances entre élus (CE 3 juin 2022, n° 452218, Cne Arvillard aux Tables).

Dans cette affaire, des administrés avaient demandé au maire de leur communiquer, notamment, tous les courriels échangés entre lui et les élus de la commune relatifs des délibérations portant sur un projet particulier de la commune.

En première instance, le tribunal administratif de Grenoble avait fait droit à la requête en annulation de la décision de refus du maire de communiquer lesdits documents.

Il considérait classiquement que, dans la mesure où les échanges électroniques entre le maire et ses adjoints concernaient des affaires communales soumises à délibération du conseil municipal, il s’agissait de correspondances produites dans le cadre d’une mission de service public et ainsi de documents administratifs au sens de l’article L. 300-2 du CRPA, susceptibles de faire l’objet d’une communication.

Le Conseil d’Etat censure ce raisonnement en considérant qu’il appartient au juge du fond, saisi d’un litige portant sur la communication de correspondances entre élus locaux, de rechercher quelle est la nature de celles-ci.

Plus précisément, le Conseil d’Etat considère qu’il appartient au juge du fond de distinguer entre les correspondances émises au nom de la collectivité, d’un côté, et celles qui révèlent des positions personnelles ou qui sont prises dans le cadre du libre exercice d’un mandat électif, réservant la communicabilité des documents aux seules correspondances émises au nom de la collectivité.

Le Conseil d’Etat rappelle, à cet égard, que « seules les correspondances émises ou reçues, dans le cadre des fonctions exercées au nom de la commune, par le maire, ses adjoints ou les membres du conseil municipal auxquels le maire a délégué une partie de ses fonctions, ont le caractère de documents administratifs » et ajoute  que « tel n’est en revanche pas le cas des correspondances des élus locaux qui ne peuvent être regardées comme émanant de la commune dès lors qu’elles expriment, notamment, des positions personnelles ou des positions prises dans le cadre du libre exercice de leur mandat électif ».

Le juge du fond aura donc désormais la délicate mission de rechercher :

  • si les échanges entre élus et maire contiennent des opinions émises ou reçues au nom de la commune (auquel cas ils seront communicables),
  • ou s’ils se bornent à traduire des positions personnelles ou politiques de ces mêmes élus, qui n’ont pas de caractère communicable, dans la mesure où leur support ne peut alors être regardé comme un document administratif dont le droit d’accès est régi par le CRPA.

Categories:

Comments are closed