Le décret du 30 décembre 2005 prévoit que si une offre paraît anormalement basse, le pouvoir adjudicateur peut la rejeter par décision motivée mais seulement après avoir demandé par écrit les précisions et justifications susceptibles d’expliquer le prix proposé.

Une fois les précisions et justifications apportées par le candidat, le pouvoir adjudicateur détermine si elles sont ou non suffisantes pour que le prix proposé ne soit pas regardé comme manifestement sous-évalué et de nature, ainsi, à compromettre la bonne exécution du marché.

En cas d’insuffisance d’éléments susceptibles d’expliquer le prix proposé, il appartient au pouvoir adjudicateur de rejeter l’offre.

Dans une affaire récente,  une société avait présenté une offre comportant un prix horaire de 16,5 euros pour les prestations simples et un prix horaire de 17,1 euros pour les prestations effectuées à l’aide d’un engin motorisé (CAA Marseille, 20 mai 2019, n°18MA01161 – 18MA01291, OPHLM Logis Cévenols).

Le pouvoir adjudicateur avait adressé à la société une demande afin, selon ses propres termes  » d’obtenir quelques précisions  » sur son offre, le courrier électronique adressé à la société indiquant à cet égard que le prix de 16,50 euros lui apparaissait  » anormalement bas par rapport au salaire minimal pratiqué dans la profession  » et précisait que, selon le pouvoir adjudicateur,  » pour des prestations comprenant le nettoyage et la fourniture des produits, le coût horaire minimal se rapprocherait davantage de 17 euros « .

Le jour même, la société a répondu en précisant le coût horaire d’un salarié majoré des cotisations sociales, le taux de marge de l’entreprise, la part du prix proposé représentée par la fourniture de produits, et en produisant la copie d’un bulletin de salaire d’un salarié faisant apparaître le salaire horaire brut pratiqué et les taux de cotisations sociales applicables à ce salaire.

Le prix horaire ainsi proposé par la société était inférieur de 21,4 % à celui proposé par l’attributaire du lot n° 1 et il n’était inférieur que de 8,3 % à celui proposé par les autres attributaires des lots n° 2 et 3, laquelle proposait un prix horaire de 18 euros, et de 2,94 % à l’évaluation du pouvoir adjudicateur lui-même.

En plus de cela, pour chacun des trois lots du marché, deux à trois candidats autres que la société évincée proposaient un prix inférieur à celui de cette société.

Se fondant non seulement sur l’ampleur limitée des écarts entre les prix proposés et à la réponse détaillée de la société évincée à une demande exprimée en des termes très vagues du pouvoir adjudicateur, la Cour a confirmé que  la décision rejetant l’offre de la société était entachée d’erreur de droit et d’erreur manifeste d’appréciation.

Il en a conclu que cette illégalité affectant ainsi l’éviction de la société requérante de la procédure de passation des marchés en cause était constitutive d’une faute de nature à engager sa responsabilité.

S’agissant alors du quantum du préjudice, la Cour a d’abord rappelé le principe selon lequel l’entreprise candidate à l’attribution d’un marché public qui a été irrégulièrement évincée de ce marché qu’elle avait des chances sérieuses d’emporter a droit à être indemnisée de son manque à gagner, ce manque à gagner devant être déterminé en prenant en compte le bénéfice net qu’aurait procuré ce marché à l’entreprise.

En l’espèce, après constaté que la société requérante avait des chances sérieuses de remporter le Marché dans son intégralité, c’est-à-dire sur les 3 lots, la Cour s’est fondée sur  un rapport rédigé par une société d’expertise comptable à la demande de la société en ce qui concernait un marché de nature et d’ampleur comparables pour déterminer la marge nette qu’aurait procuré l’exécution du Marché litigieux, à laquelle elle a ajouté une indemnité représentative des frais de soumission.

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