Dans son arrêt du 8 novembre 2017, le Conseil d’Etat a clairement rappelé que l’article 8 du code général des impôts permettait aux usufruitiers des parts de SCI d’imputer sur leurs revenus fonciers la quote-part du déficit correspondant à leurs droits dans cette société de personnes (CE 8 novembre 2017, n°399764).

Dans cette affaire, un couple avait constitué, avec leurs enfants, une société civile immobilière, dans laquelle ils détiennent chacun la pleine propriété de vingt parts sociales et l’usufruit de vingt autres parts dont leurs enfants possèdent la nue-propriété.

Ce couple avait imputé sur ses revenus fonciers la quote-part du déficit qu’ils avaient dans la SCI.

L’administration fiscale a remis en cause la déductibilité de ces sommes correspondant à la quote-part du déficit de la SCI, qui correspondait aux parts sociales qu’ils détiennent chacun en usufruit, en prétendant que l’article 8 du code général des impôts ne permettait pas à l’usufruitier d’imputer sur ses revenus fonciers la quote-part du déficit correspondant à ses droits dans la société.

Le raisonnement de l’administration fiscale a été suivie par les juges du fond qui ont considéré qu’il résultait des dispositions de l’article 8 du code général des impôts « éclairées par les travaux préparatoires de la loi n° 98-546 du 2 juillet 1998 qui a introduit à l’article 8 du code général des impôts les règles d’imposition des revenus des parts de société de personnes dont la propriété est démembrée, que dans le cas d’un tel démembrement, l’usufruitier n’est en principe imposé qu’à raison de la quote-part résultant de ses droits d’usufruitier dans les bénéfices réalisés par la société et qu’il ne peut donc pas, sauf s’il en est convenu autrement avec le nu-propriétaire, déduire les déficits engendrés par l’activité de la société ».

Or, cet article 8 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige prévoyait que: «Sous réserve des dispositions de l’article 6, les associés des sociétés en nom collectif et les commandités des sociétés en commandite simple sont, lorsque ces sociétés n’ont pas opté pour le régime fiscal des sociétés de capitaux, personnellement soumis à l’impôt sur le revenu pour la part de bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société. En cas de démembrement de la propriété de tout ou partie des parts sociales, l’usufruitier est soumis à l’impôt sur le revenu pour la quote-part correspondant aux droits dans les bénéfices que lui confère sa qualité d’usufruitier. Le nu-propriétaire n’est pas soumis à l’impôt sur le revenu à raison du résultat imposé au nom de l’usufruitier. / Il en est de même, sous les mêmes conditions : / 1° Des membres des sociétés civiles qui ne revêtent pas, en droit ou en fait, l’une des formes de sociétés visées à l’article 206 1 et qui, sous réserve des exceptions prévues à l’article 239 ter, ne se livrent pas à une exploitation ou à des opérations visées aux articles 34 et 35 (…) ».

Cet article (comme els travaux parlementaires l’éclairant) ne fait que prévoir une répartition du résultat fiscal des sociétés de personnes dont les parts sont démembrées, en ce que l’usufruitier est imposable pour la quote-part dans les bénéfices sociaux correspondant à ses droits et que, corrélativement, le nu-propriétaire n’est pas soumis à l’impôt sur le revenu à raison du résultat imposé au nom de l’usufruitier, afin de prendre en compte l’existence des droits financiers de l’usufruitier sur le résultat courant de l’exploitation et d’éviter le risque de double imposition.

Ce faisant, il n’interdit en aucune manière à l’usufruitier d’imputer sur ses revenus fonciers la quote-part du déficit correspondant à ses droits dans la société.

Et d’ailleurs, la circonstance que l’usufruitier soit imposable à raison de la quote-part résultant de ses droits dans les bénéfices sociaux ne saurait exclure à elle seule l’impossibilité pour celui-ci de déduire de ses revenus fonciers les déficits engendrés par l’activité de la société.

C’est ce qu’a considéré le Conseil d’Etat, qui a cassé l’arrêt de la cour administrative d’appel en considérant « qu’en cas de démembrement de la propriété des parts d’une société de personnes détenant un immeuble, qui n’a pas opté pour le régime fiscal des sociétés de capitaux, l’usufruitier de ces parts est soumis à l’impôt sur le revenu à raison de la quote-part des revenus fonciers correspondant aux droits dans les résultats de cette société que lui confère sa qualité. Lorsque le résultat de cette société de personnes est déficitaire, l’usufruitier peut déduire de ses revenus la part du déficit correspondant à ses droits ».

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